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Lettre de commentaires de l'ANC - Décision d'agenda provisoire de l'IFRS IC concernant IFRS 17


Le 23 mai 2022, l'ANC a publié sa lettre de commentaires en réponse à la décision d'agenda provisoire (Tentative Agenda Decision - TAD) de l'IFRS Interpretations Committee (Comité) concernant la norme IFRS 17 Contrats d'assurance.

L'ANC a des remarques à faire sur l'analyse technique du Comité telle qu'elle est présentée dans sa TAD.  Selon elle, cette analyse n'est qu'une lecture possible des dispositions de la norme IFRS 17 qui est en soi insuffisante pour rejeter l'applicabilité de la Méthode 2 au schéma des faits décrit dans la TAD. Elle invite également l'IFRS IC à prendre en compte ses autres observations avant de finaliser sa TAD.

L'analyse technique exposée dans la TAD

Pourquoi l'ANC estime que la Méthode 2 est également possible en vertu des dispositions IFRS 17 ?

La norme IFRS 17 ne fournit aucune méthodologie pour déterminer la quantité de prestations fournies par un contrat faisant partie d'un groupe de contrats d'assurance. Le paragraphe B119 de la norme précise uniquement qu'une entité considère la quantité de ces prestations pour déterminer les unités de couverture d'un groupe de contrats d'assurance (ou la quantité de services fournis au titre d'un contrat d'assurance). L'annexe A d'IFRS 17 définit les services prévus au contrat d'assurance comme les services qu'une entité fournit au titulaire d'un contrat d'assurance, y incluant la couverture d'un événement assuré (couverture d'assurance ).

La TAD déduit une description de la couverture d'assurance à partir des définitions d'un passif au titre des sinistres survenus (LIC) et d'un passif au titre de la couverture restante (LRC) qui figurent à l'annexe A de la norme IFRS 17. En utilisant cette description, la TAD explique ensuite qu'une entité considère (i) les périodes au cours desquelles l'entité a l'obligation de payer une demande d'indemnisation valable si un événement assuré se produit (critère A), et (ii) le montant de la demande d'indemnisation si une demande d'indemnisation valable est présentée (critère B) pour déterminer la quantité de prestations de couverture d'assurance fournie en vertu d'un contrat - pour déterminer in fine la quantité des prestations fournies par un contrat d'assurance. Le Comité évalue ensuite la Méthode 1 et la Méthode 2 telles que décrites dans la TAD par rapport au critère A et au critère B pour conclure que la Méthode 2 ne satisfait pas au principe du paragraphe B119 consistant à refléter les services fournis au titre d'un contrat d'assurance au cours de chaque période.

Le Comité relie des éléments de la norme IFRS 17 pour identifier deux critères qu'une entité devrait selon lui prendre en compte pour déterminer la quantité des prestations de couverture d'assurance, ce qui in fine réduit la signification d'une couverture d'assurance pour une période donnée aux paiements effectués au titulaire du contrat d'assurance au cours de cette période. L'ANC estime que la manière dont le Comité parcourt  ces éléments est loin d'être claire à la lecture des dispositions de la norme IFRS 17 et, en définitive, n'est pas convaincante. En particulier, l'ANC note que :

  • La description de la couverture d'assurance ("l'obligation d'une entité d'instruire et de payer les demandes d'indemnisation valides pour les événements assurés") est basée sur certains des mots utilisés pour définir un LIC et un LRC mais ne peuvent selon l'ANC être aussi directement liés à la couverture d'assurance. La TAD semble considérer que la référence à la couverture d'assurance dans la définition d'un LRC fournit le lien manquant pour développer une description de cette couverture. L'ANC estime qu'il s'agit d'un ajout aux dispositions de la norme IFRS 17.
  • La norme IFRS 17 ne met pas en avant explicitement les deux critères susmentionnés que le Comité déduit de la description de la couverture d'assurance. Là encore, l'ANC estime qu'il s'agit d'un ajout aux dispositions de la norme IFRS 17.

Dans l'ensemble, l'ANC pense qu'il y a tellement de jugement pour relier ces éléments de la norme IFRS 17 qu'elle considère que l'analyse du Comité n'est pas suffisamment solide pour soutenir la conclusion énoncée dans la TAD. Si l'analyse du Comité devait se vérifier, l'ANC pense que cela mettrait en évidence des faiblesses dans la lisibilité et la compréhension d'un aspect essentiel du modèle comptable de la norme IFRS 17 : si l'intention de l'IASB (Board) était de contraindre l'identification des unités de couverture selon les lignes définies par les critères A et B, pourquoi cette intention n'a-t-elle pas été rendue plus claire dans les dispositions existantes ?

Comme expliqué ci-dessus, l'ANC pense que la description de la couverture d'assurance telle que présentée dans le TAD (et les critères A et B qui en découlent) n'est pas clairement alignée sur les termes de la norme IFRS 17 et ajoute même des dispositions à cette norme IFRS. Dans la partie restante de cette section, l'ANC suppose toutefois que la description susmentionnée reflète raisonnablement les dispositions de la norme IFRS 17.

Après avoir exposé les critères A et B pour appliquer les dispositions du paragraphe B119 de la norme IFRS 17, la TAD poursuit en expliquant que l'événement assuré dans le schéma des faits est l'obligation de payer un montant périodique à compter de la daté de début de la période de rente pour chaque année de survie du titulaire d'assurance. L'ANC estime que ce n'est qu'une façon possible d'appliquer la définition d'un événement assuré.

Un autre point de vue consiste à considérer que, dans le contrat d'assurance décrit dans la demande, l'événement assuré est la survie du titulaire dont la durée est incertaine (risque de longévité). Le risque d'assurance est important car le titulaire du contrat d'assurance peut bénéficier d'une rente pendant une période de temps incertaine. Ce point de vue s'aligne pleinement sur la définition d'un contrat d'assurance et d'un événement assuré dans l'annexe A de la norme IFRS 17 - cette annexe définit un contrat d'assurance en vertu duquel une partie (l'émetteur) accepte un risque d'assurance significatif d'une autre partie (le preneur d'assurance) en acceptant d'indemniser le preneur d'assurance si un événement incertain spécifié (l'événement assuré) affecte négativement le preneur d'assurance. Pour une période de reporting donnée, la survie du preneur d'assurance au-delà de cette période peut être considérée comme l'événement assuré. Le fait que la tarification de la prime d'un tel contrat tienne compte de l'espérance de survie du preneur d'assurance - et donc que le risque de perte pour l'assureur est la survie au-delà de la durée prévue - conforte ce point de vue. En appliquant ce point de vue, le total des paiements d'annuités jusqu'au décès du preneur d'assurance avec le risque de survie au-delà de la durée prévue serait considéré comme une demande d'indemnisation valable selon le critère A. Cela refléterait le fait que la compagnie d'assurance a une obligation permanente de garantie pendant toute la période de couverture et donc que les avantages de la couverture d'assurance pour une période donnée comprennent également un droit continu pour le preneur d'assurance de recevoir des paiements annuels jusqu'à son décès. En revanche, dans cette vue, les paiements annuels ne constitueraient pas une demande d'indemnisation valable - il ne s'agit que de règlements partiels d'une demande d'indemnisation unique, survenant de manière continue pendant la période de couverture qui commence à la date de début du contrat et se terminant au décès du preneur d'assurance. En appliquant ce point de vue, la méthode 2 serait appropriée pour déterminer la quantité de prestations de couverture d'assurance fournie en vertu de chaque contrat de rente.

Par conséquent, l'ANC ne yoit aucune raison pour laquelle le Comité accordait une importance plus grande à la manière dont le TAD considère l'événement assuré dans le contrat décrit dans la question, et ce faisant, rejetterait la méthode 2. Là encore, cela impliquerait le recours au jugement qui, selon l'ANC, n'est pas approprié dans le cadre d'une décision d'agenda.

Globalement, l'ANC apprécie le bien-fondé de l'analyse présentée dans le TAD concluant que seule la méthode 1 répond au principe du paragraphe B119 de la norme IFRS 17. Cependant, elle estime que cette analyse implique trop de jugement et va finalement bien au-delà des termes de la norme IFRS. Pour les raisons exposées ci-dessus, l'ANC pense que le Comité devrait conclure que la Méthode 2 satisfait également au principe du paragraphe B119 de la norme IFRS 17.

Autres commentaires sur la rédaction

Le TAD indique que le Comité n'a pas discuté de la manière dont l'entité appliquerait d'autres dispositions de la norme IFRS 17 pour comptabiliser en résultat - séparément de la marge sur services contractuels - l'ajustement du risque pour le risque non financier. Il poursuit en déclarant que l'ajustement du risque pour le risque non financier représente "la compensation de l'entité pour supporter le risque d'assurance et les autres risques non financiers". Cette déclaration n'est pas conforme à la définition de l'ajustement du risque non financier de l'annexe A de la norme : cette annexe définit l'ajustement au titre du risque non financier comme l'indemnité exigée par une entité pour la prise en charge de l'incertitude entourant le montant et l'échéancier des flux de trésorerie qui est engendrée par le risque non financier lorsqu'elle exécute des contrats d'assurance . Tel qu'il est rédigé, le TAD implique de manière inappropriée que l'ajustement du risque pour le risque non financier reflète le risque d'assurance dans son intégralité (et donc, la marge sur ce risque dans son intégralité) - la définition de ce risque dans la norme IFRS 17 indique uniquement qu'il reflète l'incertitude quant au montant et à l'échéancier des flux de trésorerie découlant du risque non financier. Par conséquent, l'ANC recommande que la TAD soit modifiée pour s'aligner sur les termes de la norme IFRS 17.

Autres observations

L'ANC comprend que le TAD examine une question qui n'est prévalente que dans quelques juridictions. Cependant, l'ANC comprend que le Comité pourrait recevoir, et va même examiner, d'autres questions d'application d'ici la fin de 2022. Ces questions peuvent affecter matériellement un certain nombre de compagnies d'assurance dans de nombreuses juridictions.

L'ANC pense qu'il est important que, lors du traitement de ces questions d'application, le Comité prenne soin de développer des analyses techniques qui n'interprètent pas ni ne s'ajoutent aux dispositions de la norme IFRS 17. Si les dispositions de la norme IFRS 17 ne sont pas claires ou sont insuffisantes pour parvenir à une seule conclusion - comme cela est le cas selon elle pour la question décrite dans la demande, le Comité devrait évaluer, à la lumière des critères énoncés dans le Due Process Handbook (DPH) de la Fondation IFRS, s'il convient de recommander une normalisation par le Board. L'ANC pense que la question décrite dans la demande est un cas pertinent pour une normalisation comptable. Cependant, l'ANC note que la date d'entrée en vigueur de la norme IFRS 17 (soit à compter des exercices ouverts le 1er janvier 2023) approche et par conséquent que les compagnies d'assurance sont occupées à mettre en œuvre cette nouvelle norme IFRS (en particulier en ce qui concerne la préparation des informations comparatives pour 2022). Dans ce contexte, toute normalisation comptable pourrait perturber l'implémentation de la norme IFRS 17.

L'ANC recommande en conséquence au Board de ne pas entreprendre immédiatement une normalisation comptable et de traiter la question, ainsi que toute autre question d'application qui pourrait se présenter, à un stade ultérieur. En guise de conclusion, l'ANC pense qu'il y a une incohérence générale dans la façon de traiter les questions d'application des normes IFRS qui ne sont pas encore entrées en vigueur. En l'absence de toute disposition contraire dans le DPH en vigueur, le comité peut traiter de telles questions et agit donc dans le cadre de ses attributions en répondant aux questions d'application de la norme IFRS 17. Ces questions risquent de perturber les processus de mise en œuvre en cours. En revanche, l'ANC observe que :

  • le Transition Resource Group (TRG) pour IFRS 17 ne s'est pas réuni depuis 2019 - ceci afin de permettre une période de stabilité avant la date d'entrée en vigueur obligatoire de la norme ;
  • lorsqu'il a décidé des sujets sur lesquels entreprendre une normalisation dans le cadre des modifications de juin 2020 de la norme IFRS 17, le Board a spécifiquement considéré que ... toute modification de la norme ne doit pas ... perturber indûment l'implémentation déjà en cours .

L'ANC ne voit pas de justification pour une approche différente s'agissant des questions relatives à l'application des normes IFRS non encore entrées en vigueur - c'est-à-dire qu'elle ne voit pas pourquoi le principe de ne pas perturber la mise en œuvre déjà en cours  s'appliquerait au TRG ou au Board mais pas au Comité. L'ANC estime que des règles claires et cohérentes devraient s'appliquer à cet égard. Par conséquent, l'ANC invite le Comité à remonter ce point au Board et aux Trustees de la Fondation IFRS pour un examen plus approfondi dans le cadre de la prochaine révision du DPH.

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